Rapport d'activité 2015

Rapport d'activité 2015


JORF n°0054 du 4 mars 2016

Sommaire

Avant-propos
Synthèse
Liste des propositions
Première partie. - Une nouvelle Autorité pour renforcer la transparence de la vie publique
I. - Des lois ambitieuses et novatrices, votées en urgence
II. - Une Haute Autorité rapidement opérationnelle
III. - L'organisation et le fonctionnement de la Haute Autorité
Deuxième partie. - Une première année d'activité très particulière du fait des dispositions transitoires
I. - Plus de 20 000 déclarations reçues en l'espace d'un an
II. - Plus de 2 000 déclarations rendues publiques
Troisième partie. - Tirer les enseignements d'un premier cycle de contrôle
I. - La mise en œuvre, par le Haute Autorité, de ses prérogatives de contrôle patrimonial
II. - La mise en œuvre d'un contrôle nouveau des intérêts
III. - Le contrôle des déclarants de l'article 11 de la loi du 11 octobre 2013
Quatrième partie. - La Haute Autorité, un partenaire déontologique
I. - Promouvoir une culture déontologique
II. - La compatibilité d'anciennes fonctions exécutives locales ou nationales et l'exercice d'une activité privée
III. - L'agrément des associations de lutte contre la corruption
IV. - Des actions croissantes de formation et de pédagogie
V. - Le développement des contacts institutionnels en France comme à l'international
Annexes
1. Règlement général de la Haute Autorité
2. Charte de déontologie de la Haute Autorité
3. Organigramme des services
4. Autorités administratives indépendantes entrant dans le champ des lois relatives à la transparence de la vie publique
5. Charte de déontologie de la ville de Paris
6. Avis de la Haute Autorité sur la charte de déontologie de la ville de Paris

Avant-propos

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a très amplement justifié sa récente existence comme ce premier rapport d'activité essaie d'en rendre compte.
On entend parfois que la transparence est une dictature ; c'est exact lorsque se trouve injustement exposée la vie privée des citoyens quels qu'ils soient, lorsque leur intimité est violée au nom d'une curiosité malsaine ou d'une morale intolérante. Ici, il s'agit de tout autre chose. Il pèse en effet sur celles et ceux dont la mission est de voter les lois ou, au plus haut niveau, de les appliquer, une obligation particulière, un impérieux devoir, d'une part, d'agir dans leur vie quotidienne privée ou professionnelle en accord avec les textes qu'ils connaissent mieux que quiconque et, d'autre part, même si même tout procès d'intention serait vain, d'être irréprochables quant aux tentations auxquelles pourraient les soumettre l'exercice de fonction éminentes.
Pour autant, la Haute Autorité ne se définit pas comme un organe répressif, mais bien de pédagogie, de prévention. Il serait en effet abusif de s'en tenir aux seuls cas de quelques dossiers emblématiques portés sur la place publique, même s'ils contiennent en eux-mêmes leur part de pédagogie.
Il faut surtout considérer la palette très large des modes d'intervention de la Haute Autorité, dont l'existence même est un facteur fortement incitatif voir dissuasif. A l'encontre d'éventuels manquements avérés portant atteinte gravement aux objectifs des lois relatives à la transparence de la vie publique, il n'y a pas d'autre choix que celui de la rigueur. Mais à l'endroit des personnes qui parfois, sans le savoir et à fortiori sans le vouloir, se trouvent à la limite de ce que la loi nouvelle permet, la Haute Autorité peut rappeler ce que sont les repères, les règles applicables et il ne pouvait leur être rendu meilleur service.
L'autorité administrative indépendante que j'ai l'honneur de présider me semble donc avoir prouvé son utilité. Elle fait désormais partie du paysage politique et administratif. C'est un atout pour la démocratie car selon une règle simple et bien connue, la confiance n'exclut pas le contrôle. C'est sur ce seul terrain qui est aussi celui de l'indépendance et de l'impartialité que la Haute Autorité entend se placer, avec la certitude qu'elle trouvera dans ses activités la preuve de la qualité et du dévouement tant du personnel politique que de la fonction publique française. Dans un domaine où toute généralisation peut devenir un danger pour la démocratie, il est ainsi bon de rappeler que de rares arbres malades ne cachent pas la magnifique forêt qui fait la richesse de notre pays.
J.-L. Nadal

Synthèse

Le premier rapport d'activité de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) couvre une période de deux ans, de sa création par les lois du 11 octobre 2013 à la fin de l'année 2015.
Ce rapport s'attache à retracer, aussi fidèlement que possible, le processus qui a conduit à la création de cette nouvelle institution, les conditions dans lesquelles elle s'est installée et le bilan de ses deux premières années de fonctionnement, notamment dans la mise en œuvre des prérogatives qui lui ont été confiées par le législateur. Pour chacune des missions de la Haute Autorité, il fait état des difficultés rencontrées comme des propositions d'évolution, qu'il s'agisse de modifications législatives ou règlementaires.
Dans une première partie, le rapport revient sur le contexte de création de la Haute Autorité et l'adoption des lois du 11 octobre 2013, avant de s'intéresser à l'organisation et au fonctionnement de l'institution.
Une deuxième partie est ensuite consacrée à l'entrée en vigueur des dispositions des lois sur la transparence de la vie publique, qui ont impliqué la réception de plusieurs milliers de déclarations dès 2014 et la publication d'une partie d'entre elles sur le site internet de la Haute Autorité.
La troisième partie du rapport s'intéresse quant à elle à la mise en œuvre, par la Haute Autorité, de ses prérogatives de contrôle. Sont décrites à la fois ses missions en matière patrimoniale et sa mission de contrôle des intérêts des responsables publics.
Enfin, le rapport procède dans une quatrième partie à une revue des missions de la Haute Autorité sur les questions déontologiques, au travers des demandes d'avis qui lui sont adressées par les responsables publics et des actions qu'elle mène en matière de formation et de relations institutionnelles, en France comme à l'étranger.

1. Une nouvelle autorité pour renforcer la transparence de la vie publique

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique est née dans un contexte particulier. Alors que le caractère inadapté du dispositif français de prévention des atteintes à la probité publique était apparu dans le débat public depuis une dizaine d'années, avait été relevé par plusieurs rapports remis aux Présidents de la République successifs et avait donné lieu à de nombreuses propositions de loi, aucune modification d'ampleur de ce dispositif n'avait été sérieusement envisagée avant 2013.
C'est la découverte d'un compte dissimulé à l'étranger par un membre du Gouvernement qui a incité le législateur à adopter deux textes, une loi organique et une loi ordinaire, dans un temps record. En effet, six mois seulement se sont écoulés entre l'annonce des projets de loi sur la transparence de la vie publique et leur promulgation, malgré un enrichissement important des textes lors de leur passage au Parlement.
Ces lois procèdent à une refonte totale du mécanisme de contrôle de la situation patrimoniale des responsables publics, en donnant notamment à la Haute Autorité la possibilité de solliciter l'administration fiscale, et confient à cette nouvelle autorité administrative indépendante une mission inédite de prévention des conflits d'intérêts. Elles prévoient également qu'une partie des déclarations adressées à la Haute Autorité seront rendues publiques.
Enfin, sont fixées les règles relatives à la composition et au fonctionnement de la Haute Autorité, laquelle s'est constituée progressivement à partir de leur entrée en vigueur.
La première étape de cette mise place a été la désignation de son président, Jean-Louis Nadal, par décret du Président de la République pris après approbation des deux chambres du Parlement, et des huit membres de son collège, dont six sont issus des plus hautes juridictions françaises et deux désignés par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat.

2. Une première année d'activité très particulière

Si la mise en place de la Haute Autorité s'est effectuée progressivement, au long des deux années écoulées, l'entrée en vigueur des nouvelles obligations déclaratives prévues par les lois du 11 octobre 2013 est intervenue très rapidement, dès le début de l'année 2014.
En effet, le législateur avait souhaité que l'intégralité des personnes assujetties à ces obligations dépose une déclaration de situation patrimoniale et une déclaration d'intérêts en 2014, qu'il s'agisse de nouveaux déclarants comme des responsables publics qui avaient déjà adressé des déclaration à la Commission pour la transparence financière de la vie politique. Ces dépôts se sont échelonnés en trois temps, en février, juin et octobre 2014. En tout, ce sont près de 18 000 déclarations qui ont été reçues par la Haute Autorité au cours de cette année.
Cette entrée en vigueur rapide a entraîné un triple défi pour cette dernière :

- l'identification des différentes catégories de déclarants : ce travail d'identification était aisé pour certaines catégories connues de déclarants, comme les ministres ou les parlementaires, mais a pu s'avérer complexe pour d'autres catégories, notamment ceux qui n'avaient jamais effectué de déclaration auprès de la précédente commission comme les collateurs des ministres ou les membres des autorités administratives indépendantes ;
- la gestion des obligations déclaratives : une fois les déclarants identifiés, la Haute Autorité a dû procéder à l'enregistrement et la numérisation de leurs déclarations. Il s'est également avéré nécessaire de relancer ceux qui n'avaient pas adressé de déclaration et, le cas échéant, de les enjoindre à procéder à ce dépôt ;
- l'accompagnement des déclarants : si de nombreux déclarants se sont livrés pour la première fois à l'exercice déclaratif en 2014, la déclaration d'intérêts fut une nouveauté pour tous. Pour faciliter la mise en œuvre de ces obligations, la Haute Autorité a élaboré et diffusé des notices d'aide à la déclaration et a développé un service de télédéclaration, et une ligne téléphonique dédiée.

Plus de 2 000 déclarations ont été rendues publiques par la Haute Autorité en 2014 et 2015. La Haute Autorité a ainsi publié sur son site internet les déclarations de deux Gouvernements successifs ainsi que les déclarations d'intérêts de nombreux élus, notamment les parlementaires, les représentants français au Parlement européen et les exécutifs régionaux. En outre, les déclarations de situation patrimoniale de 735 parlementaires élus avant septembre 2014 ont été adressées en préfecture et peuvent désormais être consultées par l'ensemble des électeurs.

3. Tirer les enseignements du premier cycle de contrôle

Les deux premières années d'activité de la Haute Autorité lui ont donné l'occasion de mettre en œuvre l'ensemble des prérogatives qui lui ont été confiées par le législateur afin de concourir à renforcer la probité des responsables publics.
Elle a d'abord supervisé la vérification de la situation fiscale des ministres de deux gouvernements. La loi sur la transparence de la vie publique prévoit en effet que l'administration fiscale se livre à une vérification systématique et approfondie de la situation des ministres dès leur nomination, sous le contrôle de la Haute Autorité. Si cette procédure a fait la preuve de son efficacité, la pratique a montré que des améliorations restaient possibles, afin d'asseoir le rôle de coordination de la Haute Autorité et de permettre une meilleure information du Président de la République et du Premier ministre.
La Haute Autorité a ensuite procédé au contrôle des déclarations de situation patrimoniale des membres du Gouvernement et des parlementaires dont l'objectif, fixé par le législateur, est de s'assurer du caractère « exhaustif, exact et sincère » de ces déclarations. Les modalités concrètes de ce contrôle ont été définies au fil du temps, sur trois aspects essentiels :

- les échanges entre la Haute Autorité et l'administration fiscale : si les lois relatives à la transparence de la vie publique prévoient que la Haute Autorité adresse les déclarations des ministres et des parlementaires à l'administration fiscale, qui lui communique en retour les éléments dont elle dispose, ni le contenu précis des avis transmis par la DGFiP ni la liste des informations que la Haute Autorité est en mesure de lui demander ne sont déterminés par les textes ;
- la procédure d'échange avec les déclarants : le contrôle des déclarations a systématiquement donné lieu, dès lors que des divergences apparaissaient entre les éléments déclarés et les informations transmises à la Haute Autorité par l'administration fiscale, à la mise en œuvre d'une procédure contradictoire, fondée sur le dialogue avec le déclarant. Ces échanges ont eu lieu par écrit et, lorsque c'était nécessaire, les déclarants ont été reçus par les rapporteurs chargés de l'instruction de leur dossier. Les décisions prises par le collège de la Haute Autorité se sont fondées, en conséquence, sur les résultats de ces échanges ;
- les décisions de la Haute Autorité et leur motivation : les lois du 11 octobre 2013 donnent à la Haute Autorité la possibilité, lorsqu'elle constate des omissions ou des sous-évaluations dans une déclaration, de publier une appréciation ou de transmettre le dossier au procureur de la République, sur le fondement des infractions pénales prévues par ces lois. C'est toutefois à la Haute Autorité elle-même qu'il est revenu de définir les critères justifiant la mise en œuvre de l'une de ces possibilités. En outre, lorsque des déclarations contenaient des omissions ou des sous-évaluations de faible ampleur, la Haute Autorité a invité les déclarants à produire des déclarations modificatives, afin que les déclarations publiées donnent une vision complète de leur patrimoine.

Ce premier cycle de contrôle des déclarations de situation patrimoniale a également permis d'identifier des difficultés dans l'articulation entre les compétences de l'administration fiscale et de la Haute Autorité, qui pourraient être résolues en donnant à cette dernière la possibilité de procéder elle-même à certaines vérifications.
Enfin, la Haute Autorité a réalisé en 2014 et 2015, le contrôle des intérêts de plusieurs milliers de déclarants. En examinant les déclarations d'intérêts qui lui ont été adressées et en recherchant les intérêts qui n'auraient pas été déclarés, elle s'est attachée à identifier les situations potentielles de conflits d'intérêts et à déterminer, en échangeant avec les déclarants, les mesures à mettre en œuvre pour les éviter ou y mettre fin. Ces échanges ont également permis à la Haute Autorité d'affiner son interprétation de la notion du conflit d'intérêts et de définir des critères pour caractériser ces situations.

4. La Haute Autorité, un partenaire déontologique

Au-delà de ses missions de contrôle, la Haute Autorité a cherché, pendant ses deux premières années d'activité, à diffuser une culture de l'intégrité dans le secteur public.
Elle a ainsi exercé un rôle de conseil auprès des responsables publics sur les questions déontologiques, lorsqu'elle a été saisie à titre individuel, par exemple pour prévenir une situation de conflit d'intérêts, ou lorsque des institutions l'ont sollicitée pour être guidées dans l'élaboration de dispositifs déontologiques internes.
Elle a également accompagné plusieurs anciens membres du Gouvernement qui souhaitaient exercer une activité privée à l'issue de leur fonction, les lois d'octobre 2013 prévoyant qu'ils doivent saisir la Haute Autorité avant de reprendre une telle activité. Cette dernière a formulé des réserves pour prémunir les intéressés contre tout risque pénal et éviter que l'exercice de leur activité professionnelle ne perturbe le fonctionnement du ministère qu'ils ont dirigé. Elle a également attiré l'attention des élus locaux sur cette disposition que la plupart d'entre eux ignore.
Pour faire connaître ses missions et sensibiliser le secteur public aux nouvelles exigences posées par les lois sur la transparence de la vie publique, la Haute Autorité a délivré des formations à l'attention des responsables publics. Elle développe également ses relations internationales, afin d'être identifiée comme point de référence par les organisations internationales compétentes sur ces sujets, de constituer progressivement un réseau avec les institutions similaires dans d'autres pays et de participer à quelques projets de coopération bilatérale.

Liste des propositions

Proposition n° 1 : prévoir un décret d'application du III de l'article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
Proposition n° 2 : revoir les délais de dispense, afin, par exemple, de ne pas exiger de nouvelle déclaration avant un délai d'un an, sauf modification substantielle.
Proposition n° 3 : rappeler par une circulaire que la procédure de vérification fiscale des membres du Gouvernement est placée sous le seul contrôle de la Haute Autorité.
Proposition n° 4 : permettre la pleine information du Président de la République et du Premier ministre en cas d'anomalie dans la situation d'un membre du Gouvernement ou d'une personne pressentie pour occuper une telle fonction.
Proposition n° 5 : Rendre obligatoire la télédéclaration et, en conséquence, simplifier et améliorer la liste des informations demandées.
Proposition n° 6 : doter la Haute Autorité d'un droit de communication propre et lui donner accès aux applications de l'administration fiscale lui permettant de mener à bien ses contrôles.
Proposition n° 7 : modifier l'article 23 de la loi du 11 octobre 2013 pour étendre à deux mois le délai dans lequel la Haute Autorité doit rendre ses avis sur le fondement de cet article.
Proposition n° 8 : autoriser la Haute Autorité à publier les avis qu'elle rend sur le fondement de l'article 23 de la loi du 11 octobre 2013.

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