Décision n° 01-38-21 du 6 avril 2021

Décision n° 01-38-21 du 6 avril 2021

sur le différend qui oppose la SCCV Résidence Bien Vivre à la société Enedis relatif au raccordement dit « C4 » d'une résidence de services située à Saint-Paul-en-Jarez au réseau de distribution
JORF n°0147 du 26 juin 2021

Le comité de règlement des différends et des sanctions est saisi par la société civile de construction vente Résidence Bien Vivre (ci-après, la « société Résidence Bien Vivre ») des faits suivants.
La société Résidence Bien Vivre assure la gestion de résidences-services dédiées aux séniors, lesquels peuvent y bénéficier d'une prestation comprenant un logement et des services à la personne.
Une autorisation de faire fonctionner un service d'aide et d'accompagnement à domicile (un « SAAD ») a été délivrée à la société Résidence Bien Vivre par le président du département de la Loire aux termes d'un arrêté en date du 21 février 2017.
Dans le cadre du développement de son activité, elle a initié un projet de réalisation de résidence sur le territoire de la commune de Saint-Paul-en-Jarez (42740), devant s'implanter plus précisément Place du Suez, comprenant des logements individuels, des services généraux ainsi qu'une maison de santé.
Préalablement à l'obtention de l'autorisation de faire fonctionner un SAAD, la société Résidence Bien Vivre a adressé, le 30 Mai 2016, à la société Enedis une première demande de raccordement de la résidence au réseau public de distribution, enregistrée sous le numéro DC24/034090.
Sa demande a été déclarée complète le 17 octobre 2017. Le 26 janvier 2018, la société Enedis a émis une proposition de raccordement portant sur une colonne électrique et 24 points de livraison pour les logements de la résidence pour un montant de 25 274,23 euros TTC. Cette proposition a été retirée par Enedis.
Le 13 juin 2019, la société Résidence Bien Vivre a saisi la société Enedis d'une nouvelle demande tendant à obtenir le raccordement de la résidence au réseau de distribution en un point unique en basse tension supérieure à 36 kVA (dit « C4 »).
Par courrier électronique en date du 23 juillet 2019, la société Enedis a informé la société Résidence Bien Vivre de l'impossibilité de faire droit à cette demande de raccordement en précisant que la solution d'un branchement « C4 » en un point unique pour un immeuble avec colonne montante était interdite.
Par un second courrier électronique en date du 24 juillet 2019, la société Enedis indiquait à la société Résidence Bien Vivre que la résidence comprenait des appartements autonomes en location de longue durée, dotées de cuisine ou de prestations de service étant à la disposition de chacun mais ne relevant pas d'obligation de soin ou de restauration.
Le 14 août 2020, la société Enedis a émis une nouvelle proposition de raccordement numéro DC24/034090/001008, valable du 14 août 2020 au 14 novembre 2020 et pour un montant de 9 386,52 euros TTC, à laquelle la société Résidence Bien Vivre n'a donné aucune suite.
Une autre proposition de raccordement a été adressée le 31 août 2020 par la société Enedis à la société Résidence Bien Vivre, portant sur l'alimentation des services généraux de la résidence et de la maison de santé.
La société Résidence Bien Vivre a signé cette dernière proposition le 2 septembre 2020 et a réglé la moitié du devis, le solde ayant été versé à la société Enedis le 8 janvier 2021.
Le raccordement des services généraux de la résidence a été mis en service le 26 janvier 2021, la maison de la santé devant quant à elle faire l'objet d'une proposition distincte.
C'est dans ce contexte que la société Résidence Bien Vivre a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d'une demande de règlement de différend.
Par une saisine et deux mémoires complémentaires, enregistrés sous le numéro 01-38-21 les 13 janvier, 15 février et 11 mars 2021, la société Résidence Bien Vivre, représentée par son représentant légal et ayant pour avocat Me Claire GARAUD, avocat au barreau de Lyon, succédant à Me Pierre-André LAMOUILLE, cabinet FIDAL, demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures :

- de constater l'irrégularité du refus de la société Enedis d'autoriser le raccordement au réseau de distribution par un branchement « C4 » en un point unique, demandé par la société Résidence Bien Vivre pour la résidence de services située à SAINT-PAUL EN JAREZ ;
- d'annuler la décision de refus de la société Enedis d'autoriser ce raccordement ;
- d'enjoindre à la société Enedis d'autoriser ce raccordement.

Sur le fond, la société Résidence Bien Vivre soutient que :

- le concept qu'elle propose consiste à offrir aux résidents une prestation globale qui répond aux objectifs fixés par la loi du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement ;
- elle ne procède pas à de la rétrocession d'électricité ni à de l'achat pour revente d'électricité ;
- les consommations individuelles et propres aux occupants, qui ne résultent que de l'éclairage intérieur de leurs logements et de l'utilisation d'équipements électroménagers, sont marginales par rapport à la consommation collective de la résidence ;
- les occupants des logements de la résidence-services ne sont pas des clients finals au sens des dispositions de l'article L. 331-1 du code de l'énergie ni des usagers du service public de distribution mais ses clients ;
- ces résidents n'ont ni l'intention de choisir un fournisseur d'électricité ni celle de contester le modèle qu'elle propose et auquel ils ont tous adhéré ;
- les gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité ont développé une pratique visant à autoriser le raccordement de certains immeubles, dont les modalités de fonctionnement ne sont pas compatibles avec un comptage individualisé, au réseau public de distribution de l'énergie électrique (campings, hôtels, établissements d'hébergements pour personnes âgées dépendantes) et tel devrait être le cas des résidences-services ;
- Enedis fait une distinction injustifiée et incompréhensible entre les résidences-services et les maisons d'accueil rural pour personnes âgées (MARPA), lesquelles bénéficient d'un raccordement au tarif jaune et ce alors que ces deux structures sont des « résidences autonomie » au sens des dispositions de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement ;
- elle s'inscrit dans un projet à vocation sociale envers les séniors, ainsi qu'en atteste la présentation du parcours d'entrée au sein de ses établissements ;
- les services qu'elle fournit aux résidents sont dirigées par une personne diplômée en matière d'action sociale et familiale, à savoir titulaire d'un certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement ou de service d'intervention sociale (CAFDES) ;
- l'établissement propose un véritable projet de vie pour les séniors et tient une fiche AGGIR (autonomie gérontologie groupe iso ressources) pour chacun des résidents ;
- elle bénéficie, au titre de l'article L. 313-1-2 du code de l'action sociale et des familles, d'une autorisation de faire fonctionner un Service d'Aide et d'Accompagnement à Domicile (SAAD) délivrée le 21 février 2017 par le président du département de la Loire ;
- elle propose à la fois une activité résidentielle et une activité de services et exerce, en cela, une activité parfaitement comparable aux « résidences autonomie » ;
- la différenciation tarifaire imposée par la société Enedis entre les EHPAD privés et les MARPA, d'une part et les résidences-services, d'autre part, est arbitraire et n'est justifiée par aucune différence objective de situation.

Par trois mémoires en défense, enregistrés les 29 janvier, 24 février et 12 mars 2021, la société Enedis, représentée par son représentant légal et ayant pour avocat Me Michel GUENAIRE, cabinet GIDE LOYRETTE NOUEL, demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures, de rejeter les demandes de la société Résidence Bien Vivre.
Sur le fond, elle soutient que :

- la solution retenue par la société Résidence Bien Vivre méconnaît les principes fondamentaux de régulation du secteur de l'électricité, à savoir le monopole légal d'Enedis, la prohibition de la rétrocession d'électricité, la liberté de choix du fournisseur d'électricité par le consommateur final et l'autorisation obligatoire de l'activité d'achat pour revente de l'électricité audit consommateur ;
- la demande formulée par la société Résidence Bien Vivre va à l'encontre des dispositions de l'article L. 111-52 du code de l'énergie qui institue un monopole légal dans sa zone de desserte pour gérer le réseau public de distribution (RPD) ;
- Enedis est tenue de procéder, en application des dispositions de l'article L. 322-8 du code de l'énergie, au comptage de l'électricité consommée par chacun des utilisateurs de son réseau de manière individuelle et non pas par groupe d'utilisateurs sans détermination de la part de consommation de chacun d'entre eux ; or, le schéma de raccordement sollicité par Résidence Bien Vivre impliquerait un unique comptage pour l'ensemble du site, empêchant dès lors les résidents de choisir librement leur fournisseur ;
- l'effectivité du droit dont dispose le client de choisir son fournisseur d'électricité suppose que chaque locataire ait la possibilité de disposer d'un compteur individuel ainsi que d'un accès personnel au réseau d'électricité, sans être obligé de recourir au fournisseur choisi par le bailleur ;
- le droit dont dispose tout consommateur final de choisir son fournisseur d'électricité constitue un principe fondamental garanti à l'échelle européenne (article 3 de la directive 2009/72/CE) ;
- le schéma de raccordement envisagé, consistant pour la société Résidence Bien Vivre à acquérir de l'électricité auprès d'un tiers pour son propre compte, avant de la céder aux résidents moyennant facturation, méconnaît le principe de prohibition de la rétrocession d'électricité expressément prévu à l'article 24 du modèle de concession pour le service public d'énergie électrique (modèle de 1992) ;
- le contrat de bail produit en demande confirme que la société Résidence Bien Vivre facture aux résidents de l'électricité, ce qui constitue une opération de rétrocession, la circonstance que la consommation individuelle soit marginale ne permettant pas d'écarter le principe de non-rétrocession ;
- la société Résidence Bien Vivre ne figure pas sur la liste des fournisseurs autorisés pour l'exercice de l'activité d'achat pour revente d'électricité aux consommateurs finals visée à l'article L. 333-1 du code de l'énergie ;
- la résidence-services n'entre dans aucune des exceptions au raccordement direct au RPD, dès lors qu'elle ne constitue ni un réseau fermé de distribution ni un réseau intérieur de bâtiment ;
- la résidence-services ne relève pas du réseau fermé de distribution, dès lors qu'elle a vocation à alimenter ses résidents et non pas des consommateurs non résidentiels exerçant des activités de nature industrielle, commerciale ou de partage de service ; en tout état de cause, faute de publication du décret d'application du régime législatif du réseau fermé de distribution, ce schéma de réseau fermé de distribution n'est pas applicable en l'état du droit ;
- la résidence-services ne relève pas du réseau intérieur de bâtiments, dès lors qu'elle ne constitue pas un bâtiment à usage principal de bureau mais comporte 22 logements privatifs ;
- l'opérateur de la résidence-services n'est pas fondé à invoquer une méconnaissance du principe d'égalité car celle-ci ne relève ni du régime applicable aux établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ni de celui relatif aux MARPA ;
- les résidences-services sont définies à l'article L. 613-13 du code de la construction et de l'habitation comme un ensemble d'habitations constitué de logements autonomes permettant aux occupants de bénéficier de services spécifiques non individualisables ;
- elles s'adressent à des personnes autonomes, valides ou semi-valides, qui peuvent être soit locataires soit copropriétaires des logements individuels et privatifs de la résidence ;
- elles proposent ainsi des appartements individuels et privatifs et la fourniture de fluides ne figure pas parmi les « services spécifiques non individualisables » ;
- les EHPAD et les MARPA doivent, pour leur part, accompagner les résidents dans les actes du quotidien et leur proposer, le cas échéant, des actes médicaux et paramédicaux ;
- la résidence-services ne saurait être assimilée à un établissement social ou médico-social en raison de la seule détention de l'autorisation de faire fonctionner un SAAD ;
- Enedis n'a, donc, pas effectué une distinction injustifiée et incompréhensible entre les résidences-services, d'un côté et les EHPAD et les MARPA, de l'autre côté.

Par une décision du 24 février 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 mars 2021 à 12 heures.
Par courriers en date du 10 mars 2021, les parties ont été informées que la séance publique se tiendrait le 22 mars 2021 à 9 heures.
Par courrier électronique en date du 10 mars 2021, la société Enedis a demandé le report de la séance publique en raison de l'indisponibilité de son conseil aux date et heure initialement arrêtées.
Le 11 mars 2021, les parties ont été informées du report de la séance publique au 26 mars 2021.
Vu la note en délibéré produite le 1er avril 2021 par la société Résidence Bien Vivre.
Vu la note en délibéré produite le 2 avril 2021 par la société Enedis.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :

- le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
- la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
- la décision du 25 janvier 2021 du président du comité de règlement des différends de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 01-38-21.

Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Thierry TUOT, président, Mme Henriette CHAUBON, M. Henri DE LAROSIERE DE CHAMPFEU, M. Laurent-Xavier SIMONEL, membres, qui s'est tenue par visio-conférence le 26 mars 2021, après vérification de l'identité des parties et de leurs représentants, en présence de :
M. Emmanuel RODRIGUEZ, directeur adjoint des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché,
Mme Agnès LEDUC, rapporteur,
Le représentant de la société Résidence Bien Vivre, assisté de Me Pierre-André LAMOUILLE, substituant Me Claire GARAUD,
Les représentants de la société Enedis, assistés de Me Michel GUENAIRE ;
Les parties ayant été informées qu'à tout moment, le président du comité peut décider de lever la séance pour qu'elle soit prorogée à une date ultérieure en cas de difficulté matérielle, notamment liée à la capacité de connexion de l'un des participants, ne permettant pas le déroulement normal de la séance ;
L'ensemble des parties ayant confirmé la bonne qualité de la liaison électronique et avoir été informé des modalités de convocation à la séance publique.
Après avoir entendu :

- le rapport de Mme Agnès LEDUC, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de Me Pierre-André LAMOUILLE, substituant Me Claire GARAUD et de M. Vincent CALI pour la société Résidence Bien Vivre, celle-ci persiste dans ses moyens et conclusions ;
- les observations de Me Michel GUENAIRE et de MM. R. et S. pour la société Enedis, cette dernière persiste dans ses moyens et conclusions ;

Le président du comité de règlement des différends et des sanctions a interrogé les parties sur la notion de maisons d'accueil rural pour personnes âgées (« MARPA »), plus spécifiquement sur le point de savoir si cette notion correspond à une catégorie spécifique d'établissements ou seulement à un label pouvant être délivré par la Caisse centrale de mutualité sociale agricole (« CCMSA ») indifféremment de la catégorie juridique de l'établissement considéré.
La société Résidence Bien Vivre indique que cette notion correspond à un label octroyé par la CCMSA et non à une catégorie juridique d'établissement.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, le rapporteur, le public et les agents des services se sont retirés.
Sur la recevabilité de la note en délibéré produite par la société Résidence Bien Vivre le 1er avril 2021, et de la note en délibéré produite le 2 avril 2021 par la société Enedis :
1. Aux termes des dispositions de l'article R. 134-12 du code de l'énergie : « Après la clôture de l'instruction, aucune observation ne peut être déposée, ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office ». Il résulte de ces dispositions que, sauf dans le cas où le comité invite lui-même les parties à produire des pièces ou à répondre par écrit à une question qui leur aurait été posée au cours de la séance, les parties ne sont pas recevables à présenter de leur propre initiative des observations ou à produire de nouvelles pièces postérieurement à la séance.
2. Si au cours de la séance qui s'est tenue le 26 mars 2021 le président a posé plusieurs questions à la société Résidence Bien Vivre et à la société Enedis et leur a permis d'y répondre, il ne leur a pas pour autant demandé à de présenter des notes en délibéré.
Dans ces conditions, le comité écarte comme irrecevables les notes en délibéré, produite le 1er avril 2021 par la société Résidence Bien Vivre, et le 2 avril 2021 par la société Enedis.
Sur le bien fondé des conclusions de la société Résidence Bien Vivre :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 331-1 du code de l'énergie : « Tout client qui achète de l'électricité pour sa propre consommation ou qui achète de l'électricité pour la revendre a le droit de choisir son fournisseur d'électricité ». Le principe du libre choix de son fournisseur par le client final énoncé par ces dispositions est, avec le droit d'accès au réseau d'électricité et l'interdiction de raccordement indirect, essentiel à la bonne organisation du marché de l'énergie.
4. D'autre part, l'article L. 111-52 du code de l'énergie dispose que : « Les gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité sont, dans leurs zones de desserte exclusives respectives : / 1° La société gestionnaire des réseaux publics de distribution issue de la séparation entre les activités de gestion de réseau public de distribution et les activités de production ou de fourniture exercées par Electricité de France en application de l'article L. 111-57 ; / 2° Les entreprises locales de distribution définies à l'article L. 111-54 ou les entreprises locales de distribution issues de la séparation entre leurs activités de gestion de réseau public de distribution et leurs activités de production ou de fourniture, en application de l'article L. 111-57 ou de l'article L. 111-58 ; / 3° Le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité est, dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, l'entreprise Electricité de France ainsi que les sociétés mentionnées aux articles L. 151-2 et L. 152-4 ». Ces dispositions d'ordre public, qui instituent au bénéfice d'Enedis un monopole légal pour gérer dans sa zone de desserte le réseau public de distribution font obstacle, sauf exceptions légales, au raccordement indirect d'un ensemble immobilier comportant différentes installations de consommation d'électricité.
5. En application des dispositions du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles : « Sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux (…) : / (…) / 6° les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale ; / (…) ». Le I de l'article L. 313-12 du même code prévoit, en outre, que : « Les établissements mentionnés au 6° du I de l'article L. 312-1 qui accueillent un nombre de personnes âgées dépendantes dans des proportions supérieures à des seuils appréciés dans des conditions fixées par décret sont des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. (…) ».
6. Ainsi, les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) doivent fournir aux personnes âgées dépendantes des prestations minimales relatives à l'hébergement, dont la liste est fixée, par le renvoi opéré par l'article D. 312-159-2 du code de l'action sociale et des familles, à une annexe 2-3-1 intitulée « Socle de prestations relatives à l'hébergement délivrées par les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ». Aux termes de cette annexe, relèvent de ces prestations minimales des « II. - Prestations d'accueil hôtelier », qui comprennent notamment la « 1° Mise à disposition de la chambre (individuelle ou double) et des locaux collectifs » ainsi que la « 3° Fourniture des fluides (électricité, eau, gaz, éclairage, chauffage) utilisés dans la chambre et le reste de l'établissement ». Il résulte de leur objet et de leur finalité que ces dispositions dérogent expressément aux règles cardinales prescrites par le code de l'énergie, rappelées aux points 1 et 2, en prévoyant une facturation globale liée à la mission spécifique de l'EPHAD, à la situation de dépendance des résidents hébergés dans des chambres et à leur nombre.
7. Pour leur part, les résidences-services sont définies, aux termes de l'article L. 631-13 du code de la construction et de l'habitation, comme un : « (…) ensemble d'habitations constitué de logements autonomes permettant aux occupants de bénéficier de services spécifiques non individualisables. Les services spécifiques non individualisables sont ceux qui bénéficient par nature à l'ensemble des occupants. Les catégories de ces services sont définies par décret, pris après avis de la Commission nationale de concertation. / Les services spécifiques individualisables peuvent être souscrits par les occupants auprès de prestataires. Le délai de préavis préalable à la résiliation de ce contrat ne peut excéder un mois ». Aux termes de l'article D. 631-27 du même code : « Les catégories de services spécifiques non individualisables mentionnées à l'article L. 631-13 sont : / 1° L'accueil personnalisé et permanent des résidents et de leurs visiteurs ; / 2° La mise à disposition d'un personnel spécifique attaché à la résidence, le cas échéant complétée par des moyens techniques, permettant d'assurer une veille continue quant à la sécurité des personnes et à la surveillance des biens ; / 3° Le libre accès aux espaces de convivialité et aux jardins aménagés ».
8. Il résulte de ces dispositions du code de la construction et de l'habitation que les résidences-services réunissent des logements autonomes dont les occupants ont accès à des services spécifiques non individualisables limitativement définis. Selon l'annexe 1 de l'instruction n° DGCS/SD3A/DREES/2016/300 du 6 octobre 2016 du ministre des affaires sociales et de la santé, elles s'inscrivent dans une « offre commerciale relevant de l'initiative privée et individuelle dont les prestations sont avant tout orientées vers la réponse à une demande de services formulée par des consommateurs âgés, pour leur confort, leur bien-être et leur loisir, qui peuvent parfois rejoindre les objectifs de prévention de la perte d'autonomie sans que cela constitue pour autant l'objectif principal de ces structures ».
9. Dès lors, les résidences-services, qui regroupent un ensemble de logements autonomes se distinguent des EHPAD, lesquels doivent fournir à leurs occupants des prestations de complexe hôtelier incluant notamment la mise à disposition d'une chambre et la fourniture de fluides, ce qui justifie que les modalités de raccordement ou les tarifs respectivement appliqués à ces structures diffèrent pour tenir compte de ces situations distinctes, sans que cette distinction ne puisse caractériser une rupture d'égalité.
10. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la résidence-services située sur le territoire de la commune de Saint-Paul-en-Jarez dont le raccordement au réseau en un point unique est l'objet du différend, d'une surface hors-œuvre nette de 1 880 m2 et s'élevant sur trois étages, comporte 22 appartements autonomes et privatifs dont les résidents seront locataires ou propriétaires.
11. Il est constant que cette résidence, pour laquelle un raccordement par un branchement « C4 » en un point unique est demandé, relève de la catégorie des résidences-services régies par les dispositions des articles L. 631-13 et suivants du code de la construction et de l'habitation et non de celle des établissements sociaux et médicaux sociaux régis par le code de l'action sociale et des familles, qui comprend notamment les EHPAD. Cette résidence ne peut, par suite, prétendre bénéficier des mêmes modalités de raccordement et de tarifs que les EHPAD, sans que la détention, par la société Résidence Bien Vivre, d'une autorisation de faire fonctionner un service d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) ne puisse avoir une quelconque incidence sur l'appréciation des modalités de raccordement en débat. Dès lors, en l'absence d'une dérogation expresse pour la catégorie des résidences-service aux règles prescrites par le code de l'énergie, rappelées aux points 1 et 2, la société Résidence Bien Vivre n'est pas fondée à soutenir que l'objet de la résidence-services située sur le territoire de la commune de Saint-Paul-en-Jarez ou sa mission ou encore les qualités propres à ses occupants justifieraient, à eux seuls, une dérogation à ces principes.
12. En outre et en l'espèce, la société Résidence Bien Vivre ne peut pas utilement se prévaloir d'une rupture d'égalité dans les conditions de raccordement au réseau de distribution entre les résidences-services, dont relève la résidence pour laquelle le raccordement a été sollicité, d'une part et, d'autre part, les MARPA, qui ne constituent pas une catégorie juridique homogène d'établissements destinés à accueillir des séniors mais rassemblent des établissements relevant de catégories juridiques différentes dont le point commun est d'avoir reçu un label accordé par la CCMSA. Enfin et toujours en l'espèce, à supposer qu'un établissement tiers ait pu, à quelque titre que ce soit et quel que soit le régime juridique qui lui est applicable, bénéficier d'une application particulière quelconque des règles rappelées aux points 1 et 2, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur l'appréciation du bien-fondé des demandes de la société Résidence Bien Vivre portant sur le raccordement d'une résidence-services pour laquelle aucune dérogation aux règles de droit commun de raccordement ne peut être légalement accordée.
13. En conséquence, les demandes de la société Résidence Bien Vivre relatives au raccordement au réseau de distribution par un branchement « C4 » en un point unique pour la résidence de services située à SAINT-PAUL EN JAREZ, ne peuvent qu'être rejetées.

Décide :

Les demandes de la société Résidence Bien Vivre sont rejetées.

La présente décision sera notifiée à la société Résidence Bien Vivre et à la société Enedis. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 6 avril 2021.

Pour le comité de règlement des différends et des sanctions :
Le président,
T. Tuot

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