Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2023-1210 du 20 décembre 2023

Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2023-1210 du 20 décembre 2023

portant création du titre V du livre IV du code des impositions sur les biens et services et portant diverses autres mesures de recodification de mesures non fiscales
JORF n°0295 du 21 décembre 2023

Monsieur le Président de la République,
Le II de l'article 128 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022 habilite le Gouvernement, jusqu'au 30 décembre 2023, à poursuivre par voie d'ordonnance les travaux de recodification des dispositions relatives aux impositions sur les biens et services et à transférer les dispositions non fiscales du code général des impôts et du code des douanes vers les codes régissant les secteurs dont elles relèvent.
Ces travaux de recodification, engagés en 2019, ont donné lieu à la création, le 1er janvier 2022, du code des impositions sur les biens et services (CIBS) (1). Conçu en lien avec la Commission supérieure de codification, il repose sur les principes suivants :

- un périmètre généraliste. Il a ainsi vocation à comprendre l'ensemble des dispositions relatives aux impositions sur les biens et services, sans considération tenant aux modalités particulières de gestion de ces impositions ou d'affectation éventuelle de leur produit ;
- une organisation des dispositions qui, pour ce qui concerne le plan général, est fondée sur le regroupements des impositions en fonction des secteurs d'activité qu'elles frappent, traduisant le souci de tenir compte du point de vue du redevable et, pour chaque imposition, répond à une structuration uniforme en neuf blocs (2). Cette structuration uniforme s'accompagne d'une harmonisation du vocabulaire utilisé, notamment pour désigner les impositions (3) ;
- la reprise des standards modernes de rédaction législative, qu'il s'agisse de la numérotation des articles ou de leur taille ;
- le déclassement au niveau réglementaire de l'ensemble des dispositions relevant de la gestion des impositions, notamment s'agissant des modalités de déclaration et de paiement.

Ces éléments sont détaillés dans le rapport de présentation de l'ordonnance qui a institué le CIBS (4).
Dans ce contexte, la présente ordonnance poursuit trois objectifs :

- compléter le CIBS en y intégrant les dispositions législatives régissant les impositions dans les secteurs de la communication, de la culture et du numérique ;
- transférer du code général des impôts (CGI) et, plus marginalement, du code des douanes vers les codes sectoriels les dispositions non fiscales qui ont vocation à figurer dans ces codes ;
- apporter divers ajustements techniques aux dispositions existantes du CIBS, dans le sens de la simplification et la sécurité juridique.

Impositions dans les secteurs de la communication, de la culture et du numérique
Compte tenu du nombre élevé d'impositions sur les biens et services, le Gouvernement a décidé de procéder à une recodification en plusieurs étapes. Ainsi, le code publié au 1er janvier 2022 comprenait les accises sur les énergies, les alcools et les tabacs, les 18 taxes dans le domaine des transports routier (5), aérien (6) et maritime (7) et les 16 taxes sur les produits de l'industrie et de l'artisanat. Il a depuis été complété par une taxe sur le transport routier de marchandises recourant à certaines voies du domaine public routier (8).
Conformément au calendrier de travail convenu avec la Commission supérieure de codification, cette seconde étape comprend l'ensemble des taxes dont le champ d'application ou la base d'imposition reposent sur des biens ou services relevant des secteurs de la communication, de la culture et du numérique. Ces dernières sont organisées par type de base imposable selon les principes rappelés ci-dessus :

- les taxes perçues au stade de la consommation finale, parmi lesquelles sont distingués les moyens de consommation traditionnels (taxes sur les spectacles cinématographiques, les spectacles vivants et la vente ou location de vidéogrammes) et le recours aux réseaux de communications électroniques (taxes sur les services de communications électroniques, les services de télévision, les services de contenus audiovisuels à la demande et certains services numériques) ;
- les taxes perçues à un stade antérieur, parmi lesquelles sont distinguées les taxes frappant les services publicitaires selon les différents canaux (télévision, vidéo à la demande, documents imprimés, affichage en extérieur) et les autres taxes (taxes sur diverses formalités administratives, taxes sur les cessions de droits ou l'utilisation du spectre radioélectrique).

Ainsi, les dispositions régissant 18 impositions, regroupées en quatre chapitres, constitueront un nouveau titre V du livre IV du CIBS.
Certaines de ces impositions sont affectées au budget général (9) ou au bloc communal (10), mais la majorité d'entre elles est affecté à divers organismes, à savoir le Centre national du cinéma et de l'image animée (11), l'Association pour le soutien du théâtre privé et le Centre national de la musique (12), l'Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi (13), l'Agence nationale du sport chargée de la haute performance sportive et du développement de l'accès à la pratique sportive (14) et l'Agence nationale des fréquence (15). Dans le respect des nouvelles règles de codification, les dispositions relatives à l'affectation de ces taxes sont consolidées dans le code, ou, à défaut, la loi non codifiée qui régit chaque organisme affectataire ou les missions financées par chaque taxe (16). De même, lorsque l'organisme dispose de compétences fiscales propres, ces dernières sont prévues par le code qui le régit, généralement par le biais de références aux règles de droit commun régissant les sanctions et les procédures fiscales figurant dans le CGI ou le livre des procédures fiscales (LPF).
Cette recodification est réalisée à droit constant, sous réserve de précisions sur la pleine application des impositions en cause à Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon lorsque leur produit est affecté au financement de missions qui y sont réalisées par l'Etat dans le cadre de l'exercice de ses compétences.
Transfert des dispositions non fiscales vers des codes sectoriels
Le CGI comprend de nombreuses dispositions non fiscales. Ce positionnement s'explique historiquement par l'existence d'une compétence conférée aux agents de la direction générale des finances publiques ou de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI). Il est toutefois en contradiction avec les règles modernes d'organisation des codes. D'une part, ces agents sont d'ores et déjà compétents pour diverses dispositions figurant dans d'autres codes, notamment dans le secteur du tabac ou le secteur agricole. D'autre part, les codes (17) n'ont pas vocation à être organisés en fonction des compétences respectives des administrations, mais en fonction de leur objet. Ainsi le CIBS regroupe-t-il toutes les dispositions relatives aux impositions en cause et les organisent-elles indépendamment des compétences administratives sous-jacentes. A titre complémentaire, le positionnement actuel de dispositions non fiscales dans le CGI est source de confusion et d'erreurs, car il encourage leurs modifications dans le cadre des projets de loi de finances alors mêmes que les règles organiques (18) s'y opposent.
Par suite, le projet d'ordonnance met en œuvre les transferts entre codes suivants :

- les règles régissant la garantie des métaux sont déplacées du CGI vers le code de commerce ;
- celles régissant le régime économique des tabacs manufacturés et le commerce de l'alcool sont déplacées du CGI vers le code de la santé publique, dans des subdivisions dédiées à la lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, qui comprennent d'ores et déjà des dispositions ayant le même objet et contrôlées dans les mêmes conditions par la DGDDI ;
- celles régissant les pratiques du secteur agricole en matière de fabrication d'alcool à partir de leur production (régime dit « des alambics ») sont déplacées du CGI vers le code rural et de la pêche maritime. Il en est de même des dispositions transposant le cadre européen en matière de cultures et de pratiques œnologiques ;
- les règles régissant la mise à la carburation des produits énergétiques sont transférées du code des douanes vers le code de l'énergie.

Ces transferts sont, au-delà d'un travail d'amélioration de rédactions parfois désuètes et d'abrogation de dispositions obsolètes, l'occasion d'apporter diverses rationalisations que l'habilitation permet lorsqu'elles portent sur des dispositifs connexes à la fiscalité :

- il reprend la disposition simplifiant le régime de circulation des essences pouvant servir à la fabrication de produits anisés taxables qui, malgré un consensus au fond, avaient été écartées pour des raisons procédurales dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale ;
- il clarifie et précise le champ de la délégation par la loi au pouvoir réglementaire relative à la faculté d'autoriser et d'interdire les mises à la carburation de produits énergétiques. Il s'agit à la fois d'expliciter la capacité du Gouvernement à suspendre la commercialisation de carburants dangereux, mais également de faciliter des autorisations ciblées de certains carburants d'origine agricole pour certains usages.

Aux fins de pouvoir présenter ce transfert du code général des impôts dans les codes sectorielles aux acteurs économiques, de manière cohérente dans son volet législatif et réglementaire, relative à la composante non fiscale du régime dit « des contributions indirectes » (réglementation des métaux précieux, des produits vitivinicoles et de la production et du commerce des alcools et des tabacs manufacturés), un délai d'entrée en vigueur de 18 mois est ménagée pour les sections 1 à 6 du chapitre II du code des impositions des biens et services.
Autres ajustements techniques
Enfin, l'ordonnance apporte divers améliorations rédactionnelles et techniques aux dispositions résultant de la première étape de recodification, en particulier :

- la poursuite de la sécurisation des dispositions tenant aux procédures fiscales mises en œuvre par la direction générale de l'aviation civile en matière de taxes sur le transport aérien, au regard des spécificités des assiettes des taxes dont la gestion lui est confiée ;
- la clarification du cadre légal régissant les tiers collecteurs d'impôt auxquels recourt l'Etat pour percevoir les taxes à l'immatriculation, afin de permettre au pouvoir réglementaire, dans une optique de lutte contre la fraude, de renforcer les conditions d'agrément s'imposant à ces derniers ;
- l'extension de la compétence fiscale du juge administratif à une taxe additionnelle codifiées dans le nouveau code (19).

Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.

(1) Ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 portant partie législative du code des impositions sur les biens et services et transposant diverses normes du droit de l'Union européenne.
(2) Eléments taxables et territoires (c'est-à-dire le champ d'application), fait générateur, montant de la taxe, exigibilité, redevable et autres personnes soumises aux obligations fiscales (notamment les éventuels représentants fiscaux), constatation de la taxe (au moyen d'une déclaration, par voie de rôle, etc.), paiement de l'impôt, procédures et sanction (contrôles, recouvrement et contentieux) et, le cas échéant, affectation.
(3) Ces dernières sont ainsi systématiquement désignées par l'expression « taxe sur [désignation du bien ou service taxé ». Cela n'interdit pas aux gestionnaires de la taxe de recourir à des dénominations plus simples ou plus parlantes dans leurs relations avec les redevables, notamment au sein des formulaires déclaratifs.
(4) Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2021-1843 du 22 décembre 2021 portant partie législative du CIBS et transposant diverses normes du droit de l'Union européenne (JORF du 29 décembre 2021).
(5) Cinq taxes à l'immatriculation (fixe, régionale, sur les véhicules de transport, sur les émissions de CO2, sur la masse en ordre de marche), trois taxes annuelles (sur les émissions de CO2 et l'ancienneté des véhicules de tourisme et sur les véhicules de transport lourds de marchandises), une taxe sur le permis de conduire et deux taxes sur le secteur autoroutier.
(6) Trois taxes sur le transport de personnes, le transport de marchandises et les nuisances sonores aéroportuaires.
(7) Une taxe annuelle sur les engins maritimes à usage personnel (anciens droits annuels de francisation et de passeport), une taxe sur le permis de conduire, une taxe sur le transport à destination des espaces naturels protégés et une taxe sur le transport maritime en Corse et outre-mer.
(8) Ordonnance n° 2023-661 du 26 juillet 2023 relative à l'institution de contributions locales sur l'usage par les poids lourds de certaines voies routières gérées par les collectivités territoriales et transposant la directive (UE) 2022/362 du 24 février 2022 modifiant les directives 1999/62/CE, 1999/37/CE et (UE) 2019/520 en ce qui concerne la taxation des véhicules pour l'utilisation de certaines infrastructures.
(9) Taxes sur les services de communications électroniques, sur certains services numériques, sur la publicité diffusée au moyen de documents imprimés et sur la modification du contrôle d'un service de communication audiovisuelle.
(10) Taxe sur la publicité extérieure.
(11) Taxes sur les spectacles cinématographiques, sur les vidéogrammes, sur les services de télévision, sur les services de contenus audiovisuels à la demande, sur la publicité télévisuelle, sur la publicité diffusée au moyen de services de contenus audiovisuels à la demande, sur le visa d'exploitation cinématographique, sur l'autorisation d'exercice de l'activité d'exploitant d'établissement de spectacles cinématographiques et sur la production et la distribution des œuvres cinématographiques.
(12) Taxe sur les spectacles vivants (spectacles d'art dramatique, lyrique et chorégraphique et de variétés).
(13) Taxe sur la mise en relation par voie électronique en vue de fournir certaines prestations de transport.
(14) Taxe sur la cession de droits d'exploitation audiovisuelle des manifestations sportives.
(15) Taxe sur l'utilisation des bandes « 700 MHz » et « 800 MHz » du spectre radioélectrique.
(16) Un renvoi vers le code fiscal et organisé pour assurer l'articulation et la lisibilité du cadre légal.
(17) A l'exception éventuellement des purs codes de procédures.
(18) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
(19) Taxe sur la publicité extérieure. La compétence du juge administratif est également explicitée pour trois taxes : la taxe sur le visa d'exploitation cinématographique, la taxe sur l'autorisation d'exercice de l'activité d'exploitant d'établissement de spectacles cinématographiques, la taxe sur la modification du contrôle d'un service de communication audiovisuelle.

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