Cour des comptes. 4ème chambre. Arrêt d'appel. 10/09/2015

Cour des comptes. 4ème chambre. Arrêt d'appel. 10/09/2015

Commune d'Isles-sur-Suippe (Marne) - Appel d'un jugement de la chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne, Lorraine. n° 72667

République Française,

Au nom du peuple français,

La Cour,

Vu la requête enregistrée le 20 mars 2014au greffe de la chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne, Lorraine, par laquelle M. X, comptable de la commune d’Isles-sur-Suippes, a élevé appel du jugement n° 2013-0010 du 21 janvier 2014 par lequel ladite chambre régionale l’a constitué débiteur de la commune précitée de la somme de 3 383,61 €, augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 11 janvier 2013, au titre de l’exercice 2007 ;

Vu le réquisitoire du Procureur général près la Cour des comptes n° 2014-63 du 28 mai 2014, transmettant à la Cour la requête précitée ;

Vu les pièces de la procédure suivie en première instance ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu le rapport de M. Cédric BROTTIER, auditeur ;

Vu les conclusions n° 409 du 29 juin 2015 du Procureur général ;

Entendu, lors de l’audience publique du 9 juillet 2015, M. BROTTIER, en son rapport, M. Christian MICHAUT, avocat général, en les conclusions du ministère public ;

Après avoir entendu en délibéré M. Gérard GANSER, conseiller maître, en ses observations ;


Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne, Lorraine a constitué M. X débiteur de la commune précitée de la somme de 3 383,61 €, augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 11 janvier 2013, au titre de l’exercice 2007, pour avoir payé à trois agents des indemnités d’administration et de technicité sans décision de l’assemblée délibérante ;

Attendu que l’appelant admet avoir manqué à ses obligations mais qu’il conteste que ce manquement a causé un préjudice financier à la communed’Isles-sur-Suippe ;

Attendu que, se référant au code civil, il fait valoir que la commune n’a subi aucune perte ni manqué un gain, en raison de la seule absence d’une pièce justificative à l’appui du paiement de ces indemnités ;

Attendu qu’en l’espèce, la pièce manquante est une délibération du conseil municipal autorisant le versement des indemnités faute de laquelle celles-ci n’étaient pas dues ; que ce premier moyen manque donc en droit ;

Attendu que l’appelant invoque divers jugements de chambres régionales des comptes qui, dans des cas allégués comme équivalents, n’auraient pas prononcé de charges ; que l’appelant n’est pas fondé à se prévaloir de tels jugements, car ils ne lient en rien le juge, ni de première instance, ni d’appel ; que cet argument complémentaire manque également en droit ;

Attendu que l’appelant soutient que les indemnités litigieuses ont rémunéré un « service fait », attesté par la signature de l’ordonnateur sur les mandats ; qu’en l’espèce, le « service fait » relatif à ces indemnités ne peut être distingué de celui relatif aux rémunérations principales ; qu’il n’est d’ailleurs pas discuté ;

Attendu au demeurant que, si l’existence d’un service fait en contrepartie d’une dépense est une condition nécessaire pour que celle-ci soit due, ce n’est pas une condition suffisante ; que ce deuxième moyen manque donc en droit ;

Attendu que, selon l’appelant, la signature de l’ordonnateur sur les mandats, montre sa volonté « de reconnaître et valoriser la manière de servir des agents concernés » ; que cette volonté n’est pas discutée ; que toutefois elle ne suffit pas à créer une obligation de la commune vis-à-vis des agents concernés que ce troisième moyen manque aussi en droit ;

Attendu que l’appelant fait valoir que les agents, de catégorie C et exerçant des fonctions administratives ou techniques, appartenaient à une catégorie susceptible de bénéficier des indemnités d’administration et de technicité : que cette circonstance, qui n’est pas discutée, ne suffit pas à fonder juridiquement le versement de ces indemnités, à défaut de délibération ad hoc du conseil municipal ; que ce quatrième moyen manque aussi en droit ;

Attendu que l’appelant met en avant la disponibilité des crédits pour contester un « appauvrissement patrimonial de la commune » ; que cette disponibilité des crédits n’est pas mise en cause ; qu’elle n’entraîne pas que les dépenses imputées sur ces crédits étaient dues ; que ce cinquième moyen manque donc en droit ;

Attendu que l’appelant se prévaut des observations de l’ordonnateur du 31 janvier 2013 selon lequel le paiement des indemnités n’a pas causé de préjudice et d’une délibération du conseil municipal du 13 mars 2014 dans le même sens ;

Attendu que, lorsque l’instance est ouverte devant le juge des comptes, le constat de l’existence ou non d’un préjudice financier relève de l’appréciation de ce juge ; que, si au regard du caractère contradictoire de la procédure, ledit juge doit tenir compte, pour cette appréciation, des dires et actes éventuels de la collectivité qui figurent au dossier, il n’est pas lié par une déclaration de l’ordonnateur ou de l’organe délibérant indiquant que la collectivité n’aurait subi aucun préjudice ; que dès lors les observations du 31 janvier 2013 et la délibération du 13 mars 2014, postérieurs aux paiements litigieux et au réquisitoire introductif d’instance du procureur financier du 10 décembre 2012, ne peuvent suffire à écarter l’existence d’un tel préjudice ; que ce sixième moyen manque lui aussi en droit ;

Par ces motifs,

DÉCIDE :

Article unique - La requête de M. X est rejetée.

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Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section. Présents : M. Yves ROLLAND, président de section, président de la formation, Mme Anne FROMENT-MEURICE, présidente de chambre maintenue en activité, MM. Gérard GANSER, Jean-Pierre LAFAURE, Jean-Yves BERTUCCI, conseillers maîtres, Mme Isabelle LATOURNARIE WILLEMS, conseillère maître.

En présence de Mme Marie-Noëlle TOTH, greffière de séance.

Marie-Noëlle TOTH

Yves ROLLAND

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-16 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues à l’article R. 142-15-I du même code.

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