COUR DES COMPTES - Première Chambre - Arrêt - 24/05/2017

COUR DES COMPTES - Première Chambre - Arrêt - 24/05/2017

Direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris - Pôle de gestion fiscale de Paris Nord-Est - Ex-direction des services fiscaux de Paris-Est (Service des impôts des entreprises (SIE) de Paris - 19ème arrondissement Amérique-Combat et Buttes-Chaumont - Exercice 2008 - S-2017-1580 - n° S-2017-1580

La Cour,

Vu le réquisitoire n° 2016-67 RQ-DB du 13 octobre 2016 par lequel le Procureur général près la Cour des comptes a saisi la première chambre de ladite Cour en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, en la personne de ses ayants droit, comptable du service des impôts des entreprises (SIE) de Paris – 19 ème  arrondissement Amérique-Combat et Buttes Chaumont, à raison d’opérations relatives à l’exercice 2008, ensemble la preuve de sa notification à l’ayant droit dudit comptable, le 20 décembre 2016, au directeur régional des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris, le 16 décembre 2016, et au directeur général des finances publiques, le 16 décembre 2016 ;

Vu les comptes de la direction régionale des finances publiques d’Ile-de-France et du département de Paris rendus pour les exercices 2008 à 2011, y annexés les états des restes à recouvrer établis, en sa qualité de receveur des administrations financières, par M. X pour la période du 1 er janvier au 31 décembre 2008 ;

Vu les justifications produites au soutien des états des restes à recouvrer susvisés, ensemble les pièces recueillies au cours de l’instruction ;

Vu le code de commerce, notamment ses articles L. 622-17 et L. 641-13 ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu l’article 60 modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;

Vu le décret n° 77-1017 du 1 er septembre 1977 relatif à la responsabilité des receveurs des administrations financières ;

Vu le rapport de M. Jean-Christophe Chouvet , conseiller maître, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu les conclusions du Procureur général ;

Entendu, lors de l’audience publique du 25 avril 2017, M. Jean-Christophe Chouvet , en son rapport,  M. Bertrand Diringer , avocat général, en les conclusions du ministère public, les parties n’étant ni présentes ni représentées ;

Entendu en délibéré M. Guy Fialon , conseiller maître, en ses observations ;

Sur la présomption de charge unique à l’encontre de M. X, relevée dans le réquisitoire susvisé du 13 octobre 2016, sur l’exercice 2008

Attendu que par le réquisitoire susvisé le Procureur général a estimé que la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X pourrait être mise en jeu, sur l’exercice 2008, au motif qu’à la clôture dudit exercice, quatre créances dont le montant total s’élevait à 33 648 € n’auraient pas été recouvrées sur l’entreprise débitrice, en raison de l’insuffisance des diligences effectuées en vue de leur recouvrement, lesdites créances nées de la poursuite de l'activité de la société débitrice placée en redressement judiciaire n’ayant pas fait l’objet de la déclaration prévue par l’article L. 622-17 du code de commerce susvisé ;

Sur l’existence d’un manquement du comptable à ses obligations

Sur la règle de droit

Attendu qu’aux termes de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963 susvisée, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes et des contrôles qu’ils sont tenus d’exercer en cette matière dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique susvisé ; que leur responsabilité personnelle et pécuniaire se trouve engagée dès lors qu’une recette n’a pas été recouvrée ; que la responsabilité du comptable public en matière de recettes s’apprécie au regard de ses diligences, celles-ci devant être adéquates, complètes et rapides ;

Attendu qu’aux termes du I de l’article L. 622-17 du code de commerce, lescréances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance;

Attenduque le I de l’article L. 641-13 du même code est ainsi rédigé : « Sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire : / - si elles sont nées pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l'activité autorisé en application de l'article L. 641-10 ; / - si elles sont nées en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant le maintien de l'activité ou en exécution d'un contrat en cours décidée par le liquidateur ; / - ou si elles sont nées des besoins de la vie courante du débiteur, personne physique. / En cas de prononcé de la liquidation judiciaire, sont également payées à leur échéance, les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire mentionnées au I de l'article L. 622-17. » ;

Attendu qu’aux termes du IV de l’article L. 641-13 du même code : «Les créances impayées perdent le privilège que leur confère le présent article si elles n'ont pas été portées à la connaissance du mandataire judiciaire, de l'administrateur lorsqu'il en est désigné ou du liquidateur, dans le délai de six mois à compter de la publication du jugement ouvrant ou prononçant la liquidation ou, à défaut, dans le délai d'un an à compter de celle du jugement arrêtant le plan de cession» ;

Sur les faits

Attendu qu’à la clôture de l’exercice 2008, une société à responsabilité limitée restait redevable, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, d’une somme totale de 117 271 € en droits ;

Attendu que la société débitrice a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, ouverte par un jugement du 6 février 2007, publié le 8 mars 2007, prévoyant une période d’observation de quatre mois ; qu’à la suite du jugement arrêtant le plan de cession partielle en date du 3 juillet 2007, publié le 9 août 2007, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire par un jugement du 24 juillet 2007, publié le 2 septembre 2007 ;

Attendu que, par une lettre du 18 septembre 2007, reçue par le liquidateur judiciaire le 21 septembre 2007, le comptable public a déclaré les créances formant le total ci-dessus mentionné de 117 271 €, en se référant aux dispositions de l’article L. 622-24 du code de commerce ; qu’y figuraient les quatre créances citées au réquisitoire, pour 33 648 € ; qu’il est toutefois constant que ces dernières étaient nées après la publication du jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, ce qui leur conférait un privilège ; qu’elles relevaient non de l’article L. 622-24 du code précité, mais de l’article L. 622-17 ;

Attendu que les créances ont été admises en non-valeur le 27 décembre 2011 ;

Sur l’application au cas d’espèce

Attendu qu’il est constant que le comptable a porté les quatre créances litigieuses à la connaissance du mandataire judiciaire sous une qualification juridique erronée ;

Attendu toutefois que les quatre créances en cause ont été correctement inscrites par le liquidateur judiciaire sur la liste des créances visées à l’article L. 622-17 du code de commerce ; qu’elles n’ont ainsi pas perdu le privilège que leur conférait la loi ; que, de ce fait, nonobstant l’erreur du comptable, ses diligences en vue du recouvrement desdites créances ne se sont pas révélées inadéquates ; qu’il n’y a pas lieu, en conséquence, de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X à raison du défaut de recouvrement desdites créances ;

Par ces motifs,

DÉCIDE :

Présomption de charge unique. Exercice 2008.

Article 1 er . – Il n’y a pas lieu de mettre en jeu la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, en la personne de ses ayants droit, à raison de la présomption de charge unique relevée dans le réquisitoire susvisé du 13 octobre 2008.

Article 2. – M. X est déchargé de sa gestion, en la personne de ses ayants droit, au titre de l’année 2008.

Fait et jugé par M. Philippe Geoffroy , président de section, présidant la formation de délibéré ; MM. Daniel-Georges Courtois , Bruno Ory-Lavollée , Vincent Feller , Mme Dominique Dujols et M. Guy Fialon , conseillers maîtres.

En présence de Mme Valérie Guedj , greffière de séance.

Valérie GUEDJ

Philippe GEOFFROY

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

Conformément aux dispositions de l’article R. 142-20 du code des juridictions financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce dans les conditions prévues au I de l’article R. 142-19 du même code.

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