COUR DES COMPTES - CHAMBRE DU CONTENTIEUX - Arrêt d'appel - 16/10/2023

COUR DES COMPTES - CHAMBRE DU CONTENTIEUX - Arrêt d'appel - 16/10/2023

Syndicat intercommunal de ramassage et de traitement des ordures ménagères (SIRTOM) de Briey, de la vallée de l'Orne et du Jarnisy - Exercice 2018 - Appel d'un jugement de la chambre régionale des comptes Grand Est - n° S-2023-1087

La Cour,

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des juridictions financières ;

Vu l’article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963, de finances pour 1963 (II.- Moyens des services et dispositions spéciales), en vigueur à l’époque des faits, ensemble le II de l’article 29 de l’ordonnance n° 2022-408 du 23 mars 2022 relative au régime de responsabilité financière des gestionnaires publics ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’État, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

Vu le décret n° 2022-1604 du 22 décembre 2022 relatif à la chambre du contentieux de la Cour des comptes et à la Cour d’appel financière et modifiant le code des juridictions financières, notamment son article 11, IV ;

Vu la requête enregistrée le 23 janvier 2023 au greffe de la chambre régionale des comptes Grand Est, par laquelle M. X, comptable du syndicat intercommunal de ramassage et de traitement des ordures ménagères (SIRTOM) de Briey, de la vallée de l’Orne et du Jarnisy a élevé appel du jugement n° 2022-0022 du 18 octobre 2022 par lequel ladite juridiction l’a déclaré débiteur envers ce syndicat de la somme de 3 273,49 € au titre de l’exercice 2018 et a sursis à sa décharge au titre du même exercice, jusqu’à apurement du débet ;

Vu les pièces complémentaires produites par l’appelant, le 24 mai 2023, à l’appui de sa requête ;

Vu les pièces de la procédure suivie en première instance, notamment le réquisitoire n° 2021-0068 du 13 octobre 2021 du procureur financier près la chambre régionale des comptes Grand Est ;

Vu la décision du 30 mai 2023 par laquelle le président de la chambre du contentieux a désigné M. Patrick SITBON, conseiller maître, magistrat chargé de l’instruction ;

Vu l’ordonnance de règlement notifiée à M. X le 7 juillet 2023 et notifiée au ministère public le même jour ;

Vu la communication le 7 juillet 2023 du dossier de la procédure au ministère public près la Cour des comptes ;

Vu la convocation de M. X à l’audience publique du 21 septembre 2023 notifiée à l’intéressé le 7 juillet 2023 ;

Vu les conclusions du Procureur général n° 247du 27 juillet 2023 ;

Vu le courrier électroniquede M. X, en date du 6 septembre 2023, demandant à ne pas comparaitre à l’audience, ensemble la lettre de la présidente de la formation de jugement du même jour le dispensant de se présenter en personne à l’audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Entendu lors de l’audience publique du 21 septembre 2023, M. Pierre VAN HERZELE, avocat général, en les conclusions du ministère public, les autres parties informées de l’audience n’étant ni présentes, ni représentées ;

Entendu en délibéré M. Paul de PUYLAROQUE, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;

1. Par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes Grand Est a déclaré M. X débiteur envers le SIRTOM de Briey, de la vallée de l’Orne et du Jarnisy de la somme de 3 273,49 € au titre de l’exercice 2018, pour avoir imputé à tort au cours de cet exercice une dépense d’investissement en section de fonctionnement, privant ainsi le syndicat d’une recette du fonds de compensation de la TVA (FCTVA) à percevoir en 2020 et évaluée à 3 273,49 €. Elle a considéré que le comptable avait manqué à son obligation de contrôle de l’exacte imputation des dépenses et que ce manquement avait causé un préjudice financier au syndicat, privé d’un reversement du FCTVA en 2020, quand bien même l’écriture erronée a fait l’objet d’une correction en 2021 et que la dépense a été finalement imputée en section d’investissement.

2. L’appelant demande l’annulation du jugement, ou, à défaut, de constater que le manquement n’a pas causé de préjudice et d’annuler le débet prononcé à son encontre.

Surla régularité

3. L’appelant conteste, dans son mémoire en appel, la régularité du jugement de la chambre régionale des comptes Grand Est, en ce que celui-ci aurait omis de discuter des arguments apportés par ses soins dans ses dernières observations écrites du 20 septembre 2022. Il allègue en particulier l’absence de réponse de la chambre à un argument fondé sur un jugement de celle-ci en date du 1 er  septembre 2022, portant sur les comptes du SMICTOM du nord du Bas-Rhin, lequel porterait sur des faits de même nature et aurait conduit la chambre à adopter une position opposée à celle prise dans le jugement dont est appel. Il indique également que ses écritures rappelaient les règles de prescription du FCTVA, la correction comptable réalisée en 2021 et l’absence de responsabilité du comptable qui en découlait.

4. Le mémoire de l’appelant, daté du 20 septembre 2022 et transmis à la chambre régionale des comptes Grand Est par M. X préalablement à l’audience, se borne à mentionner succinctement le jugement du 1 er  septembre 2022 afin d’introduire son argumentation sur l’absence de préjudice, selon laquelle la dépense comptabilisée à tort en 2018 dans les dépenses de fonctionnement a bien été comptabilisée en 2021 dans les dépenses d’investissement ; il en résulte son intégration dans l’assiette éligible à un remboursement du FCTVA en 2023, d’où l’absence de préjudice pour le SIRTOM.

5. Selon le jugement attaqué, «  Le comptable du SIRTOM soutient que le manquement n’a pas causé de préjudice financier car les écritures correctives opérées en 2021 permettront au syndicat de bénéficier du FCTVA sur cette opération. Ce dernier étant au régime de droit commun du FCTVA, prévoyant de déclarer en année N les dépenses réalisées en année N-2, il pourra inclure cette dépense au titre de la déclaration 2023 afin de bénéficier du reversement de la TVA. Il ajoute qu’en l’absence de placements rémunérés par la règle de dépôt des fonds obligatoires, il n’y a pas de préjudice réel  ».

6. Dès lors que le jugement retrace les grandes lignes de l’argumentaire de l’appelant, l’absence de mention expresse du jugement du 1 er  septembre 2022 dans le jugement querellé n’est pas de nature à entacher celui-ci d’irrégularité. Au demeurant les premiers juges mentionnent, au point 15 du jugement querellé, le raisonnement du comptable pour l’écarter au point 17. En conséquence, le moyen qui manque en fait doit être rejeté.

Surle fond

7. L’appelant soutient que le FCTVA est couvert par la prescription quadriennale, que le fait générateur du FCTVA pour cette dépense court à partir du 1 er  janvier 2020 et ne sera donc définitivement prescrit que le 1 er  janvier 2024. Il souligne la correction de comptabilisation opérée en 2021, captures d’écran Helios à l’appui, laquelle permettra le remboursement du FCTVA en 2023. Il déduit de cette absence de prescription de recouvrement l’absence de préjudice financier et demande l’infirmation du jugement sur ce point.

8. Le FCTVA est soumis à la déchéance quadriennale, en vertu de l’article 1 er de la loi du 31 décembre 1968 susvisée. Dès lors, à la date de l’audience de la chambre régionale des comptes Grand Est, le 18 octobre 2022, soit moins de trois ans après la survenance du fait générateur, la recette attendue n’était pas prescrite.

9. En outre l’imputation exacte, en 2021, de la dépense au débit du compte 2182 « Matériel de transport » était susceptible d’entraîner un paiement du FCTVA à ce titre. Or il ressort des documents produits par l’appelant dans sa production complémentaire du 24 mai 2023, dont un arrêté préfectoral d’attribution du FCTVA pour 2021 assortie d’une annexe détaillée, que la recette du fonds de compensation de la TVA, qui aurait dû être perçue en 2020 et évaluée à 3 273,49 €, a effectivement été accordée au SIRTOM en 2023 et enregistrée dans ses comptes.

10. Il en résulte que le SIRTOM de Briey, de la vallée de l’Orne et du Jarnisy n’a pas subi de préjudice financier, que le moyen du comptable appelant doit être admis, que c’est à tort que la chambre régionale des comptes Grand Est a jugé que le manquement du comptable a entraîné un préjudice financier au détriment du SIRTOM et qu’il convient en conséquence d’infirmer le jugement querellé sur ce point.

11. Dès lors, saisie par l’effet dévolutif de l’appel, la Cour constate qu’en l’absence de préjudice financier, il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X du chef de la charge unique soulevée par le réquisitoire n° 2021-0068 du 13 octobre 2021.

Par ces motifs,

DÉCIDE :

Article 1 er . – Le jugement du 18 octobre 2022 est infirmé.

Article 2. – Il n’y a pas lieu à charge à l’encontre de M.  X au titre de la charge unique du réquisitoire, au titre de l’exercice 2018.

Article 3.  –  En conséquence, M.  X est déchargé de sa gestion au titre de l’exercice 2018.

Fait et jugé par Mme Marie-Odile ALLARD, présidente de section, présidente de la formation ; M. Vincent FELLER, conseiller maître, Mme Catherine PAILOT-BONNÉTAT, conseillère maître, M. Paul de PUYLAROQUE, conseiller maître.

En présence de Mme Vanessa VERNIZEAU, greffière de séance.

En conséquence, la République française mande et ordonne à tous commissaires de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.

En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par

Vanessa VERNIZEAU

Marie-Odile ALLARD

Conformément aux dispositions du IV de l’article 11 du décret n° 2022-1604 du 22 décembre 2022 relatif à la chambre du contentieux de la Cour des comptes et à la Cour d’appel financière et modifiant le code des juridictions financières , les arrêts prononcés par la Cour des comptes sur les appels des jugements rendus par les chambres régionales des comptes avant le 1 er janvier 2023 peuvent faire l’objet d’un recours en cassation devant le Conseil d’État. La révision d’un arrêt peut être demandée après expiration du délai pour se pourvoir en cassation, et ce dans les conditions prévues aux articles R. 142-4-6 et R. 142‑4‑7 du même code.

Vous ne trouvez pas ce que vous cherchez ?

Demander un document

Avertissement : toutes les données présentées sont fournies directement par la DILA via son API et ne font l'objet d'aucun traitement ni d'aucune garantie.

expand_less